Au moins seize des 30 Sénateurs haïtiens, issus dans leur majorité du groupe GPR, ont adopté vendredi une résolution rejetant de manière anticipée la candidature à la Primature de Me Bernard Gousse et demandant au Président Michel Martelly de désigner un nouveau Premier ministre, a annoncé sur Radio Kiskeya le Sénateur Moïse Jean-Charles.
Remis au Président du Sénat, Rodolphe Joazile, qui devait l’acheminer à son tour au chef de l’Etat, le texte de cette résolution a pratiquement sonné le glas de la ratification du juriste de 52 ans qui avait été, pourtant, invité à faire mardi prochain le dépôt de ses pièces à la Chambre haute.
Le Sénateur Joazile a confirmé avoir reçu la correspondance de ses collègues qualifiée de "cas d’espèce" et comptait en informer Me Gousse qui devait décider de l’opportunité ou non de poursuivre ses démarches.
"Le Premier ministre désigné est politiquement mort et lorsqu’une personne meurt, on n’a pas d’autre choix, il faut l’inhumer", a lancé Moïse Jean-Charles, troisième Sénateur du nord élu sous les couleurs de INITE, la plateforme de l’ancien Président René Préval.
Dans leur "résolution politique", les 16 membres du Grand Corps, auxquels devraient s’adjoindre d’autres parlementaires reprochent notamment à Bernard Gousse son implication présumée, comme ancien ministre de la justice, dans des "répressions, arrestations arbitraires et assassinats dans les quartiers populaires de Port-au-Prince" durant la transition ayant suivi, en 2004, la chute du Président Lavalas, Jean-Bertrand Aristide.
Une insurrection armée des partisans de ce dernier, dont le nom de code était "Opération Bagdad", avait fait d’innombrables victimes au sein de la population civile et de la Police Nationale à côté d’énormes pertes matérielles et d’une destruction systématique de la vie sociale.
Le rejet "très original" de la désignation de Bernard Gousse constitue pour Michel Martelly le deuxième camouflet politique infligé par le Parlement et une manifestation supplémentaire de son incapacité à former le premier gouvernement de son quinquennat, deux mois après son arrivée au pouvoir dans un contexte post-séisme d’extrêmes urgences et de priorités nationales incontournables.
Le 21 juin dernier, déjà au seuil d’un climat de polarisation politique plein d’irritants, la Chambre des Députés avait fait une croix sur la nomination de l’homme d’affaires Daniel Rouzier.