Un jeune a été tué mercredi et plusieurs ont été blessés par balles lors des manifestations violentes qui ont suivi la proclamation des résultats, amenant le président René Préval à appeler au calme.
Le jeune manifestant a été tué par balles au Cap-Haïtien dans le nord du pays au cours d’affrontements entre les partisans du candidat à la présidence Jude Célestin, soutenu par le pouvoir, et ceux du chanteur populaire Michel Martelly, écarté du second tour, selon des médias locaux.
Mardi soir, avec trois heures de retard, le Conseil électoral a annoncé que le deuxième tour opposerait le 16 janvier l’ex-Première Dame Mirlande Manigat (31% des voix) à Jude Célestin (22%). Michel Martelly, arrivé troisième (21%), est le grand perdant du scrutin.
Sa troisième position et la faible marge qui le sépare du candidat du pouvoir passe mal chez ses partisans alors que le chanteur avait régulièrement accusé le parti au pouvoir, Inité, de fraude électorale.
Le quartier général d’Inité a du reste été incendié dans la matinée à Port-au-Prince, après une nuit de violences sporadiques qui se sont répandues dans tout le pays dès l’annonce des résultats préliminaires.
Empêchés d’approcher du palais présidentiel par des unités anti-émeutes, les partisans du chanteur se déplaçaient mercredi dans toute la ville. Certains brandissaient des portraits de M. Martelly, d’autres, armés de bâtons, frappaient des poubelles ou jetaient des pierres.
Les manifestations semblaient être les plus grosses dans le pays depuis la réélection de M. Préval en 2006.
Ce dernier a lancé un appel au calme mercredi. "Manifestez, c’est votre droit, mais ne vous attaquez pas aux édifices publics, aux commerces et aux bien privés des gens", a-t-il déclaré sur les ondes de la Radio nationale d’Haïti.
"Les résultats peuvent être contestés devant le contentieux électoral comme le prévoit la loi, mais pas dans les manifestations de rue, ce n’est pas cela la démocratie", a dit M. Préval en rappelant que les résultats des élections ne sont pas définitifs.
Les tensions qui règnent en Haïti rappellent de mauvais souvenirs dans un pays qui a connu instabilité politique et coups d’Etat à répétition dans son histoire récente. Elles marquent une nouvelle épreuve pour une population déjà éreintée cette année par le séisme dévastateur du 12 janvier et l’épidémie de choléra qui a fait plus de 2.100 morts depuis la mi-octobre.
La compagnie aérienne American Airlines, principal transporteur international présent en Haïti, a suspendu pour mercredi et jeudi ses vols vers et au départ d’Haïti.
Les Etats-Unis se sont dits "préoccupés" par les résultats "incohérents" de l’élection, au regard de résultats partiels donnés lundi par des observateurs homologués par l’Union européenne qui avaient mis le candidat du pouvoir en troisième position, loin derrière M. Martelly.
Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, s’est lui aussi dit "préoccupé par les allégations de fraude" et a pris note du fait que ces "résultats ne sont pas définitifs" et demandé à tous les candidats "d’épuiser toutes les procédures légales"
De son côté Paris a appelé au calme et demandé à ce que les recours soient traités "de manière rigoureuse et transparente" par le Conseil électoral. La diplomatie canadienne a exhorté "tous les acteurs de la scène politique à remédier aux irrégularités, conformément à la loi électorale".
L’annonce des résultats préliminaires ouvre une période de recours éventuels avant la publication des résultats définitifs du premier tour prévue le 20 décembre. Le successeur du président René Préval prendra ses fonctions le 7 février.